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LES INTERVIEWS VIDÉOS

EL AMPARO (2016), Rober Calzadilla
Colombie

Discussion avec le réalisateur après la diffusion de son premier film, El Amparo, sur le rapport aux militaires en Amérique latine, les séquelles laissées par l'histoire vraie des survivants, sur les acteurs et sur le travail d'immersion avant le tournage. 

Discusión con el realizador después de la proyección de su primera película, El Amparo, sobre la relación con los militaires en América latina, las consecuencias, el casting y el trabajo de immersión en el pueblo antes del rodage.

Donc, vous êtes trois réalisateurs, je voulais vous demander depuis combien de temps vous travaillez ensemble, et pourquoi vous avez décidé de travailler ensemble.

 

Roberto  Persano (à droite de l'écran) : On s’est connu il y a vingt ans, à peu près, nous étudions ensemble en Sciences de la communication à l’Université de Buenos Aires. Et cela fait dix ans qu’on travaille ensemble, plus ou moins, depuis 2006, lorsque nous avons commencé à travailler pour notre premier film.

 

Pourquoi avez-vous décidé de travailler en trio?        

LA PARTE POR EL TODO, G. MARTINEZ CANTO, S. NACIF CABRERA, R. PERSANO
Argentine

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R. : On a commencé à travailler ensemble déjà depuis l’Université, donc, il y avait déjà une bonne dynamique de travail. Et aussi, parce que je pense qu'on se complète. On s’occupe tous les trois de la recherche, du scénario, de la direction et de la production. Mais, il se trouve que, par exemple, Gato Martinez Cantó est plus à l’aise ou qu’il se dédie plus à la production, nous nous l’aidons, et moi je m’occupe plus de la caméra, et alors, ils m’apportent un coup de main aussi. 

 

Gato Martinez Canto (à gauche de l'écran) : En plus, c’est quelque chose de beau... J’ajouterai un mot pour expliquer pourquoi : c’est une construction intersubjective. C’est à dire que la subjectivité, c’est la vision que chacun de nous peut avoir sur les choses, et quand quelqu’un construit quelque chose d’intersubjectif, c’est une construction collective de cette intersubjectivité. C’est donc une expérience enrichissante de construire un regard collectif, et c’est un processus car cela ne s’est pas fait du jour au lendemain. Pour nous, cet exercice a été une expérience très riche.

 

Pourquoi avoir choisi le documentaire plutôt que la fiction?

PINAMAR (2016), FEDERICO GODFRID
Argentine

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Pour commencer, quelle a été ta formation ?

 

J’ai eu mon diplôme de Design Images et Son, l’équivalent des Arts Audiovisuels, à l’Université publique de Buenos Aires. Depuis vingt ans, j’enseigne dans cette formation où j’ai commencé d’abord comme assistant puis comme professeur. En parallèle, j’ai fais du théâtre jusqu’en 2007. Cette année là, j’ai voyagé à El Chaco, dans le nord-est de l’Argentine, où j’ai réalisé mon premier film : La tigra (Chaco). À partir de ce moment là, le film a eu un parcours très intéressant qui m’a permis de commencer en tant que directeur pour développer un nouveau et second projet beaucoup plus solide en terme de production. En 2011, on a commencé à réaliser Pinamar, en 2015, nous avons filmé, et aujourd’hui nous sommes là. 

Est-ce que tu as des expériences dans le documentaire ?

 

J’aimerais pouvoir toucher à tout. Le fictif, c’est ce que j’aime le plus parce que ce genre a quelque chose de poétique, pour moi j’aime le fait de raconter une histoire fictive, ce qu’on peut retrouver dans le documentaire, mais c’est quelque chose que je n’arrive pas à faire en comparaison aux réalisateurs de documentaires que je voie. Ma spécialité c’est la direction d’acteur que j’ai enseigné dans différents endroits comme au Venezuela, à Cuba, au Brésil. À partir des films des longs-métrages, nous nous sommes présenté à des concours pour pouvoir développer des séries de télévision subventionnées par l’État, nous avons présenté nos projets, qui me semblait intéressants. On m’a appelé pour faire un documentaire sur les picapiedras, un métier qui devient de plus en plus rare en Argentine, dans les montagnes pour faire des baldosas, et le but était de retrouver ces personnages qui travaillaient de ça, et de retrouver ce qu’était ce métier, je travaille toujours sur l’amour, l’amour de quelque chose. Ces gens là étaient amoureux des pierres. Un autre documentaire que j’ai présenté, à partir du la loi pour la mariage pour tous en Argentine, il m’a semblait intéressant de travailler sur série de quatre chapitres seulement sur l’amour. D’ailleurs, ce documentaire je l’ai appelé Amor, en traitant le thème d’un point de vue qui ne part du regard de la minorité, parce qu’il me semblait que quelque chose se produisait et qui était destiné à la communauté, mais pour moi, les problèmes pour être avec quelqu’un, sont les même pour tous. Ce qui m’intéressait, c’était d’aborder la question de l’amour et des constructions du relationnel et du couple au-delà de l’orientation sexuelle. On a donc fait quatre chapitres où l’un aborder la question trans chez les hommes, un autre chapitre sur le même thème mais chez les hommes, un chapitre sur l’évolution d’un couple de femmes, et le dernier traitait de la question parentale. 

R. : Je crois que c’est due à la formation que l’on a eue, et c’est quelque chose aussi de personnel. Par exemple, pour ma thèse, j’ai travaillé sur le documentaire. Même si dans la formation que nous avons reçue, on ne voit pas beaucoup de cinéma, puisqu’elle est plus théorique, ce genre m’a toujours intéressé, peut être pour le côté recherche. Entre la fiction et le documentaire, ce sont deux logiques différentes, et je me sens plus à l’aise avec le documentaire, du fait que les personnages vivent dans la réalité.

 

G. : C’est parce que aussi, c’est due à nos recherches qu'on a choisi le documentaire. Notre Université a une pensée, formation, très critique de gauche, et de centre gauche. Le documentaire interpelle, interroge le monde, et ce qui est intéressant c’est qu’il remet en question les histoires (de la réalité). 

 

Par rapport à au révisionnisme, est-ce qu’à un moment vous avez pensez à revoir, ou à remettre en question les mouvements de gauche des années 60?

 

G. : Nous avons fait un film, qui a été validé par l’I.N.C.A.A. (Institution National du Cinéma et des Arts Audiovisuels), qui d’une certaine façon    

est une biographie, un biopic, d'un personnage que l’on a rencontré lors du tournage sur le Nicaragua, (--) de una generación, qui s’appelle Aurora Sanchez Nadal. C'est la fille d'un révolutionnaire anti-franquiste, qui doivent s’exiler en France (de ce fait, elle naît à Marseille), puis elle et son frère partent en Argentine. Et pendant les années 70, ils commencent à créer des liens avec les organisations de gauche, qui étaient pour la lutte armée, le PRTER (Partis Révolutionnaire des Travailleurs Armée révolutionnaire du Peuple). Cette organisation de gauche, armée, dont Aurora et son frère appartenait, luttait contre la dictature, et ils ont du s’exiler en France, à Paris, puis au Nicaragua, où ils ont fait partie du processus nicaraguayen. Plus tard, son frère fait partie d’un commando qui réalise le jugement du dictateur Somoza, dans la ville de Asunción (la capitale de Paraguay). Puis, son frère et son fils, au moment de la démocratie, ont pris** une caserne de l’armée argentine (« La tablada »), où ils se font prendre, se font exécuter et leurs corps disparaissent. Et nous, dans ce film, nous sommes assez critique par rapport à cette prise de la caserne, la Tablada, qui provoqua des conséquences, et aussi pour réfléchir sur les limites de la lutte armée, et comment a-t-elle été pensée pour prendre le pouvoir, pour faire la révolution sociale, et comment ils auraient dû changer. Même si nous nous considérons de gauche, ou de centre gauche, et que nous avons des affinités pour les politiques du Kichnérisme de ces dernières années, et avec certains points du Péronisme, cela ne veut pas dire que nous sommes ignorants, et que nous savons qu’il y a eu une partie du Péronisme qui a voulu s’enrichir et garder le pouvoir. Donc, même en ayant cette opinion, et même en faisant cette critique, nous considérons que c’est nécessaire de se questionner sur ce qu’il s'est passé avec la gauche de notre pays et avec celle de l’Amérique latine.  

 

Votre film m’a parut très intéressant, mais pourquoi avez-vous décidé d’introduire le pro-filmique, de montrer le Maxi Barzi en train de dessiner, et de montrer les caméras, voire l’arrière du décors?

 

R. : Cette mise en scène a été un choix fait dès le début. C’est à dire que l’introduction de l’animation a été une mise en scène très importante, nous avions fait, en parallèle, un travail très classique par rapport aux recherches avec les archives, les interviews, et pour dévoiler l’horreur de cette époque, on ne voulait pas tomber dans le fictif. Et nous avions vu un film où Maxi avait travaillé, La mirada perdida, un court-métrage que je vous recommande, et la technique qu’il avait utilisée nous avait plu, et à ce moment là, on a décidé de l’introduire dans notre projet. Puis, le risque du dessin en direct, c’était de savoir ce qu’il allait se passer une fois avoir filmer, parce que c’était quelque chose que l’on ne pouvait pas contrôler, même si l’esthétique, on l’avait travaillée en amont, avec le condor, les mains, c’était parfait. Mais, on avait peur à l’heure du montage, si ça allait coller ou non. Et donc, d’un côté pouvoir utiliser ce qui avait été filmé dans différents endroits, qui fonctionnent avec les micro-histoires, et de l'autre, pouvoir jouer avec le support de ces endroits là. C’est une technique qu’on avait utilisé dans un film précédent, El arma fuerte, dans une prison pour mineurs, où nous leur avions prêté la caméra pour qu’il puisse créer, et en même temps, nous les filmions et eux nous filmaient. Et le but, c’était d’effacer les limites, et de ne plus savoir qui filmait qui. À un moment dans le film, on ne se rend plus compte si ceux qui filment ce sont les enfants ou si c'était nous. La logique de montrer l’arrière du décors avec le dispositif de l’animation était aussi une question technique dans le cas où tout ne fonctionnait pas. Le but était de dévoiler l’artifice, c’est à dire, de dénuder l’artificiel. Et en plus, ce qui se passe c’est que par rapport à notre culture et, par rapport à votre génération, plus que dans la nôtre, il y a une nouvelle culture audiovisuelle qui avance par rapport au paradigme de l’écriture. Et ce qui avant était une erreur, comme montrer la scène de tournage, ça s’est incorporé dans la narration audiovisuelle. 

R. : Nous sommes partis d’une recherche que l'organisation des Grands-Mères avait faite sur les maternités dans le circuit CAMPS pour voir ce qui s’était passé dans tout le pays et de transférer la recherche faite sur papier à l’écran. Donc, oui, à ce moment là nous avons pris contact avec les Grands-Mères, ce qui nous a aidé à trouver les enfants (nés dans ces maternités clandestines). Ce qui nous intéressait dans la recherche de ces « enfants » c’était, d’un côté, qu’ils soient naît dans l’un de ces centres clandestins, et d’un autre côté, qu’aujourd’hui, qu'ils soient parents. C’est à partir du moment où les 119 petits-enfants sont apparus, qu'une sélection a été faite par rapport aux naissances dans ces maternités, et puis au fur et à mesure, les critères de sélection se sont resserrés. Les petits-enfants    -   qui aujourd'hui sont parents -

- vivent différemment leurs histoires, donc, certains nous ont dit oui, puis après, ils ont changé d’avis, qu’ils ne voulaient plus parler parce qu’ils traversaient un moment compliqué, qu’ils voulaient prendre de la distance... Sur les trois qui apparaissent dans le film, il y en a seulement un qui est là depuis le début, et  pour les autres nous avons dû chercher. 

 

G. : Dans le studio, le climat était tendu à cause de l'ampleur de ces histoires, les entendre en direct a été quelque chose de très fort. Ce qu’on a essayé de faire, c’était de ne pas rentrer dans le discours qu’ils avaient déjà construits. Donc, nous avons commencé d’une autre façon, sur le thème de la maternité, ce qui a pu nous amener à l’histoire de leur naissance. Mais, d'après ce qu'ils nous ont dit, ils sont réussis à se sentir à l’aise. L’ambiance de confiance qui s’est installée s’est développée peut être grâce à la stratégie que nous avions pensée, celle de les sortir du discours judiciaire, juridique, voire celui des archives, pour éviter que la personne commence à raconter l’histoire de cette façon. On a abordé le thème d’une autre façon en leur posant des questions du genre : tu es papa? tu es maman? Racontes-nous, parle-nous de tes enfants, que font-ils? Ils étudient, ils font du sport? Tu te souviens de la naissance de tes enfants? Comment sont-ils nés? Et que penses-tu de la naissance de tes enfants par rapport à ta naissance? Le but était de chercher un axe pour qu’ils commencent à penser depuis la profondeur.

 

R. : Par rapport au tournage, ce ne sont pas tant de jours de travail parce que ça tourne entre 12 à 15 jours de tournage, mais oui il y a une extension de la durée, depuis le moment où la recherche se construit, puis vient la rédaction du scénario, contacter les personnages, et donc, on revoit le scénario. Depuis le premier jour de recherche jusqu’à la diffusion du documentaire, il y a eu à peu près 4 ans de travail. Et 15 journées de tournage répartis en deux ans. D’abord, ce qu’on a commencé à faire, ce sont les entretiens avec les petits-enfants, puis avec la journaliste, et après, nous sommes allés dans les anciens centres clandestins de maternités pour faire les projections. L’idée était d’y aller avec déjà les descriptions de ces centres, sachant que pour y rentrer ce n’est pas aussi simple que ça, pour trouver les endroits sur lesquels on projèterait les images d’animation. Et c’est à partir de là que l’on a construit vraiment le scénario. 

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Et par rapport à la musique, comment ça s’est passé avec Teresa Parodi? Est-ce que la musique a été faite pour le film?

 

R. : Teresa Parodi est une chanteuse populaire argentine très connue, et admirée. Si vous connaissez Mercedes Sosa, c’est comme si elle la remplaçait comme symbole de la musique folklorique de l’Argentine. Ça a été un luxe de travailler avec elle. Moi, je travaille dans la ex-EMA, l’espace de mémoire, et Teresa était la directrice. Quand on a commencé le projet, cela nous paraissait très intéressant de travailler avec elle pour son talent comme chanteuse et compositrice, mais aussi pour son engagement politique. Elle a beaucoup aimé le projet, on lui a demandé de nous faire une chanson et un leitmotiv, puis elle nous a donné deux chansons qu’elle avait composé, ce qui nous a beaucoup plu.

Et par rapport à ce que tu avais énoncé sur la thématique universelle de tes films, pourquoi avoir fait ce choix?

 

Je ne sais pas trop, j’essaies de ne pas trop y penser, mais j’essaye d’approfondir un thème qui m’intéresse sur le moment et qui va m’intéresser encore assez pour le travailler pendant au moins deux ans. Et ce qui m’intéressait, c’était de partir d’un endroit, y être, écrire depuis Pinamar, et d’y aller avec les garçons. On a pensé, avec la scénariste, y aller pour travailler, dans cet appartement familiale pendant les week-ends, à 300 km de Buenos Aires. Quand on y était, on écrivait et on allait dans les lieux qui pourraient être les lieux de tournage, on rencontrait des personnes différentes, c’est comme ça que l’on a rencontré la dame de l’immobilier, qui n’est pas une actrice et qui nous a parue être quelqu’un de très intéressant dans sa façon de regarder, sa gestuelle, etc, et nous l’avons donc choisie pour ce rôle. C’est comme ça aussi que l’on a rencontrer toutes les pêcheuses de Pinamar, et qu’on est tombé sur Violeta, qui apparaît trois minutes dans le film, mais qui a un regard très profond, et qui devait marquer le public pour laisser empreignait le fantôme de la mère des garçons dans les esprits. On voit son regard dur, à la fois très masculine et très féminine, cette dualité m’intéresse beaucoup chez les personnes.

 

Ce qui m’a intéressait aussi, c’était de traiter l’émotion masculine parce que la relation entre deux soeurs a déjà été traité. En revanche, la relation entre deux frères est un espace un peu méconnu.

Ce pouvait être un défis assez intéressant d’expérimentercette relation depuis le regard masculin. Donc, à partir de ce moment, là on se posait des questions, que leur arrive-t-il à ces deux adolescents? On ne voulait pas qu’il y ait d’adultes, ils n’existent pas dans le scénario. Et cela m’intéressait d’autant plus que cet endroit soit vécu* par des jeunes seulement.  

 

Est-ce que c’est un hommage à ton adolescence? 

 

Non, je ne pense pas. Je n’ai pas d’accroche avec ce lieu en particulier. Mais oui il existe un sentiment d’accroche avec ce que j’ai pu imaginer et les relations que j’ai pu y projeter. Il se passait quelque chose dans le fait de passer les hivers seul là-bas, d’y aller pour se reposer… Parfois, j’y allais seul sur un coup de tête alors qu’il n’y avait personne, et je m’imaginais des choses ou des relations qui pouvaient naître, une romance, par exemple. C’était un moment de projection de mon imagination et de mes désirs d’adolescent. 

 

Quand j’ai vu La vie d’Adèle et qu’elle avait été primée a Cannes, je me disais enfin un film primé à Cannes qui ni une dénonce, et qui montre quelque chose qui est en train de se passer, de se ressentir. J’ai beaucoup aimé en tant que collègue que cela se produise, et parce que c’est une façon de filmer que je revendique, je crois que dans Pinamar j’exagère, mais c’est le fait de regarder les premiers plans qui filment que les visages, sans que le personnage exprime ce qu’il ressent. Personnellement, je resterai filmer les visages des gens à longueur de journée, en me demandant ce qu’ils sont entrain de ressentir. 

L’action en elle-même ne m’intéresse pas, mais comment plutôt. Et quand je vois ce film, je me dis que je ne suis pas le seul, qu’il n’y pas besoin de tout montrer. Et dans The Skip, ce qui  m’intéresse c’est l’adolescence, ce moment où les hormones sont en ébullition, les désirs, que tout soit un jeu, que des choses sans intérêt deviennent très importantes. Et j’ai donc cité ce film parce que Lucile de Calan m’a demandé avec quel réalisateur argentin tu te sentirais identifié, et je me sens identité avec beaucoup d’entre eux, mais j’ai préféré penser dans avec une vision plus large, parce que le regard que l’on se construit, il se forme avec non seulement les films de nos compatriotes, mais aussi avec tous les films internationaux que l’on peut voir, jusqu’à Star Wars construit notre manière de voir le monde et les films.

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